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ORDRE MARTINISTE DES RITES UNIS
28 septembre 2010

Prophétesses, ... II

... Suite ....

Des définitions et un inventaire :

Le nom Prophète, engendre 7 synonymes ... j'en ajouter un huitième : Elu Coën ! Surprenant ? Non pas du tout !

Je m'en explique, Martinez de Pasqually, fut un véritable praticien d'une « Théurgie supérieure », glanée ici et là, et rendant l'Adam que nous sommes, conscient de sa place originelle et de sa destinée qui est de se réconcilier avec son Créateur et par là, réintégrer progressivement l'univers créé dans l'immensité divine. Martinez de Pasqually enrichi de ces connaissances colligées tous azimuts à des sources supposées qu'il n'a pas révélées va élaborer un système personnel pour entrer en contacte avec les entités angéliques messagères de Dieu. A noter qu'Eve n'était pas exclue de ces cérémoniels ! Au cours de ces évocations, devaient apparaître, ou apparaissaient des glyphes lumineux, manifestations directes de présences ... Ces manifestations ne sont pas sans rappeler les récits contenus dans les « Oracles Chaldaïques », recueils de révélations divines, canon de la pensée magique, où se mêlent réflexions philosophiques, rituels, et procédures de déification, le tout étroitement imprégné de magie. On attribue la paternité de ces Oracles à deux magiciens chaldéens, d'où leur nom, et ayant vécu vers 170 sous l'empereur romain Marc Aurèle : « Julien-père, le philosophe » et « Julien-fils dit le théurge. » Seuls des fragments de ces oracles sont parvenus jusqu'à nous.

Reprenons, notre énumération des synonymes :

Annonciateur,
Augure,
Devin,
Messager, c'est l'évidence pour Pasqually.
Nabi (Prophète),
Visionnaire.

Son féminin, Prophétesse a 5 synonymes :

Pythie,
Sibylle,
Pythonisse,
Voyante.
Bacchante

Les Prophétesses, Voyantes, Pythonisses, Pythies, Sibylles, Bacchantes même famille donc ! Toutes parlent à la place d'une divinité : « NIL MORTALE SONANS AFFLATA ES NUMINE CELSO. » (Tu ne prononceras pas de parole humaine, mais tu es inspirée par la divinité.) Un certain nombre ont tenu des rôles de premier plan dans les Sociétés méditerranéennes. Dans la Grèce archaïque, chez les Babyloniens, aucune décision importante engageant la cité n'était prise sans que la Prophétesse ou la Pythie ne soit consultée. Il existait des familles de Devins, de Devineresses où le don de prédire se transmettait héréditairement. Les procédés de divination étaient multiples : observation du vol des oiseaux : aigles, vautours, faucons, lignes de la main, examen des traits du visage, observation de la conformation des entrailles des animaux sacrifiés, des humains, ce qui nous amène à jeter un regard d'effroi sur les prophétesses du monde gaulois où elles jouissaient dans leur tribu d'un statut presque divin. Elles étaient parfois discrètement sollicitées en dehors de leur fonction pour fabriquer des filtres, ou lancer des malédictions qui pouvaient s'avérer mortelles. Strabon (64-21/25 av. J.C.) fait ce récit particulièrement effrayant :

« Elles étaient grises parce qu'âgées, portaient des tuniques blanches recouvertes par des manteaux du lin le plus fin et des ceintures de bronze. Ces femmes pénétraient dans le camp l'épée à la main, se précipitaient sur les prisonniers, les couronnaient puis les conduisaient jusqu'à un chaudron de bronze ... une femme montait sur une marche et, se penchant au dessus du chaudron, tranchait la gorge du prisonnier que l'on maintenait au dessus du récipient. D'autres découpaient le corps et, après avoir examiné les entrailles, prédisaient la victoire. »

Une légende celtique veut que neuf prophétesses, les Barrigènes, vouées à une virginité perpétuelle, vêtues d'une longue robe noire serrée à la taille, coiffées d'un bonnet blanc, exerçassent, la nuit à la lumière lunaire leur magie sur l'île de Sein (Sain, ou Sayn) à l'abri des regards profanes. Elles expliquaient les songes, évoquaient les morts. On les voyait rapporte Tacite accomplissant des sacrifices nocturnes, nues, le corps teint en noir, les cheveux en désordre, des torches à la main et s'agitant comme des furies. On leur apportait des présents en échange de leurs prophéties. L'une d'elle aurait prévu sa fin prochaine à Alexandre Sévère (222-235). L'Empereur Aurélien, (207-275) consulte des prophétesses gauloises dans la période troublée du IIIe siècle où l'existence de l'Empire romain est menacée !

Mais d'où peut venir cette soif chez l'Homme de connaître l'Avenir, et cela est à noter, depuis la nuit des temps. Connaître son destin est une obsession dévorante chez l'homo-sapiens ! La peur de l'Inconnu tenaille, elle est comme inscrite dans les gènes. Existe-t-il une explication à cette angoisse ? : « La source de la peur est dans l'avenir, et qui est libéré de l'avenir n'a rien à craindre. » (Milan Kundera). Nous avons eu maintes fois au cours de l'existence le sentiment viscéral, intime, aux heures sombres, aux heures de détresse, que par « jeu », par « punition », notre Créateur bloquait notre mental dans le doute, dans une attitude d'éternelle « questionnance ». Il est à noter encore que notre civilisation occidentale moderne est la seule qui rejette comme superstitions, et balivernes des phénomènes, des réponses, insérés profond au cœur d'autres cultures. Elle est réticente à admettre qu'une croyance n'est jamais dénuée de fondement. Notre Science, enfin, une certaine science, celle que décrit Voltaire en ces termes : « A chaque époque, la science voudrait dévorer une vérité qui la gêne », cette science là, leurre notre mental dans sa cogitation permanente en lui proposant des réponses qui se veulent rationnelles, en abscisses et en ordonnées. On peut se mettre à craindre parfois que nos connaissances matérialistes du Monde, aient évincé de nos esprits conditionnés des cheminements étiquetés autoritairement : « irrationnels », ou bien mis en « sens interdits », ou « mis en camisoles. » Petite interrogation qui se veut perfide : Dans ce contexte un homme de science, un philosophe, digne de ce nom peut-il, aujourd'hui, comme hier, sans problème, sans prêter à sourire, sans soulever des vagues de quolibets, des haussements d'épaules consulter sans motif avoué la Sibylle ? Réponse : Oui, pourquoi pas, mais en catimini ; nous aborderons, plus loin le cas de Louis-Claude de Saint-Martin, ce philosophe méconnu qui aurait peut-être dû le rester ... ! Mais au fait, quelle définition peut-on donner du Philosophe ?! C'est tout simplement, pour faire bref, un observateur sincère de l'humanité ...Blaise Pascal (1623-1662) qui fut un des esprits scientifiques les plus brillants de son temps, doublé d'un mystique, écrit : « la dernière démarche de la raison est de reconnaître qu'il y a une infinité de choses qui la surpassent ; elle n'est que faible si elle ne va jusqu'à connaître cela. Accepter qu'il puisse y avoir de l'irrationnel, c'est être rationnel. Il est rationnel de reconnaître les limites de la raison. Cette position s'allie aisément avec la foi. Les vérités de la foi sont supérieures à celles de la raison. »

Laissons, avant d'aller plus avant, la parole à Sri Aurobindo (1872-1950), homme politique, poète, et, justement philosophe :

« A sa manière, la science est elle même un occultisme, car elle met en lumière les formules que la Nature a cachées et elle utilise sa connaissance pour libérer certaines opérations de l'énergie de la Nature, que celle-ci n'avait pas fait prévoir dans son jeu normal, et pour organiser et mettre au service de l'homme ses pouvoirs et ses processus occultes ; elle est un vaste système de magie physique, car il y a et ne peut y avoir d'autre magie que l'utilisation des vérités secrètes de l'être, des pouvoirs et des processus de la Nature. Il est même possible qu'on se rende compte un jour qu'une connaissance supra physique est nécessaire pour que la connaissance physique soit complète, car derrière les processus de la Nature physique il y a un facteur supra physique, un pouvoir, une action mentale, vitale ou spirituelle qui n'est décelable par aucun moyen externe de connaissance. »

Pour conclure et condamner : Vouloir tout rationaliser relève de la tentative de vouloir tout soumettre à une logique qui ne s'y plie pas ! « La rationalisation, c'est une logique close et démentielle qui croît pouvoir s'appliquer sur le réel et, quand le réel refuse de s'appliquer à cette logique, on le nie ou bien on lui met les forceps. » Consulter la Sibylle d'Athènes, ou celle du XVIe arrondissement de Paris, celle de la baraque de la Foire du Trône, cela répond avant tout pour le consultant lambda à un besoin d'être rassuré dans sa détresse face au temps qui va l'anéantir, alors Pythies, Voyantes, Devineresses, Prophétesses deviennent devant cette angoisse, des guides, des recours presque religieux qui se veulent entrer en résonnance avec un monde très loin du Pragmatisme de la Société. Spinoza délivre ce message à méditer face au gouffre :

« Nous sentons et savons par expérience que nous sommes éternels »

« Celui qui prophétise parle aux hommes pour les édifier, les exhorter et les consoler... » (Paul aux Corinthiens.)

Pythie, ... Oui, Pythie ! Ce nom désigne les prêtresses d'Apollon, leur faculté de divination relevait pour tous d'une capacité qui ne pouvait qu'être divine. Socialement la Pythie jouit à cette époque d'un statut institutionnel. Ovide nous donne le nom de la première Pythie connue de Delphes : Thémis (la Justice). Les Pythies connurent une apogée entre 700 et 400 av. J.C. on les représente souvent, une branche de laurier à la main, elles s'exprimaient parfois en vers, parfois en chantant s'accompagnaient d'une harpe. Le chant a été un moyen d'amener à la prophétie extatique. Cette relation « musique/prophéties » explique pourquoi : « Faire de la musique et Prophétiser » ne se distinguent pas dans les langues anciennes.

Platon témoigne que Socrate, son Maître, commença son cheminement à la suite d'un oracle prononcé par la Pythie de Delphes. Le père de la Philosophie occidentale resta toujours à l'écoute de leurs messages, et de leurs conseils. Le quotidien des Pythies était régi par des règles très strictes, et sacrées. A ceux qui osaient douter de ces prophétesses, qui ne voyaient en elles que gesticulations et propos décousus, Socrate prenait partie en faisant leur éloge, promouvait sans hésitation leurs paroles comme d'inspiration divine.

L'appellation de Pythie, hommage au Serpent Python vient d'une légende qui veut qu'Apollon, nommé aussi le « Pythien » aurait tué le serpent Python gardien de l'antre de la déesse Gaia, sa maîtresse, pour installer son culte sur le site de Delphes. D'autres lieux de grande renommée ont abrité des Pythies : Olympie, ... Dodone, en Epire, Amphiardéion. Les Pythies modernes n'ont guère changé, elles vaticinent avec un peu plus de discrétion seulement, mais encore pas toujours.

Une certaine madame Germaine Soleil, (1913-1996) nom prédestiné ( !) eût son temps de célébrité, qui ne s'en souvient ? Sa voix était quotidiennement sur les ondes ! On fait encore aujourd'hui appel à elle dans cette expression rendue populaire par Pompidou, pour marquer qu'on ignore ce qui va se passer : « Je ne suis pas madame Soleil ! » D'autres, en appelle à une certaine Madame Irma, ... un personnage de fiction ! Les chefs de nos plus hautes instances politiques consultent toujours les Pythies ! Si elles ont perdu leur statut officiel elles n'en demeurent pas moins influentes, plus personne ne veut plus les envoyer au diable, on les mets seulement en concurrence ! Chaque année en décembre la Presse augmente ses tirages en publiant leurs prédictions !

Dans le monde grec les Pythies étaient choisies selon des critères précis, et rigoureux, elles étaient formées, encadrées, authentifiées par les hautes instances religieuses. C'étaient en quelque sorte des « fonctionnaires »! Les premières Pythies sont jeunes, jolies, et vierges, s'offrant à Apollon dans une relation qui devait demeurer exclusive, elles ne devaient fréquenter aucun autre homme. Elles peuvent se voir un peu comme nos « rosières », ces jeunes filles reconnues pour leur sagesse, leur conduite irréprochable. Parenthèses : il est dit que la première « rosière » connue chez nous, aurait été la sœur de saint Médard, sainte Médrine. Fermons la parenthèse. Plus tard les Pythies seront choisies parmi des quinquagénaires, âge avancé pour l'époque, suite au viol d'une jeune Pythie par un dévot. Leur bien né, établi, et leur vocation reconnue ces quinquagénaires devaient abandonner maris et enfants pour vivre à l'abri de toutes les impuretés. Une fois par an, février/mars, la Pythie était chargée de répondre aux questions posées aux dieux. Plus tard devant l'afflux des consultants l'oracle de Delphes « fonctionnera » le septième jour de chaque mois, et, en certaines circonstances, trois Pythies officieront. A chacune de ses consultations la Pythie entre en transe comme une bacchante, il est rapporté qu'elle est alors agitée de mouvements bizarres, désordonnés, état peut-être dû à l'absorption d'une substance hallucinogène psycho-active comme la datura. Plutarque parle aussi d'un souffle embaumé qui se dégageait du sol de l'adyton où elle officiait, provoquant son extase, mais parfois aussi le suicide chez le simple mortel non en état de grâce qui venait par hasard à respirer ce souffle. La Pythie délivrait ses messages, ses visions, d'une voix instinctive où dominaient les sons gutturaux. Le poète Lucain (39-65) décrit le comportement d'une de ces pythies :

« La voix de la Prophétesse, ressemble à des cris d'animaux, à des bruits naturels. Ce sont des sonorités effrayantes et peu harmonieuses : aboiement, hurlement, grincement, sifflement ou bruissement, le vocabulaire est étendu

Héraclite (vers 576-vers 480 av. J.C.) fait lui aussi un portrait, peu flatteur de la Sybille :

« La Sybille à la bouche délirante, profère des mots sans sourire, sans fards et sans parfums, grâce au dieu, sa voix se fait entendre pendant mille ans. »

Le consultant ne pouvait-être que de sexe masculin. Les prédictions sont parfois gravées sur des tablettes de cire. Des Pères de l'Eglise et non des moindres fantasmeront sur ces transes. Origène, Jean Chrysostome font des Pythies un vase d'élection démoniaque, ils en font des femmes possédées par le démon, c'est une vision qui va peu à peu d'ailleurs structurer les bases d'une diabolisation de la femme ! « Assise, les jambes ouvertes, pénétrée par le sexe par un esprit malin qui l'emplie de folie, les cheveux épars, la bouche écumante. » ...

Paul Valéry (1871-1945) ! !

« La Pythie, exhalant la flamme
De naseaux durcis par l'encens,
Haletante, ivre, hurle !...l'âme
Affreuse, et les flancs mugissants !
Pâle, profondément mordue,
Et la prunelle suspendue
Au point le plus haut de l'horreur,
Le regard qui manque à son masque
S'arrache vivant à la vasque,
A la fumée, à la fureur ! »

A suivre ...

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