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ORDRE MARTINISTE DES RITES UNIS
7 octobre 2010

Prophétesses, ... IV

... Suite ....

Voyances, Prophéties, au « Siècle des Lumières. »

Ce Siècle, dit aussi «Siècle Eclairé » bouleverse les fondements de la Société, il relève d'une nouvelle façon de penser, on commence à percevoir le Monde sous un aspect différent, le « Ose savoir » de Kant (1724-1804) remet en question les idées et les valeurs reçues, spirituelles, sociales, pseudo scientifiques, en fait, cette société est agonisante elle assiste médusée, fataliste à des évènements qui vont l'amener à une nouvelle ère. Ce Siècle s'illumine sous la lumière métaphorique des connaissances et non plus sous l'illumination divine. L'homme misérable se rebiffe ne veut plus être confiné dans la geôle douloureuse du péché originel, Voltaire va opposer à une société occidentale en fin de course la vision simple et rassurante d'une Société en quête de son épanouissement. L'historiographie à retenue pour ce siècle cette définition :

« Le siècle des Lumières : siècle un, profondément, mais combien divers. La raison éclaire tous les hommes, elle est la lumière, ou plus précisément, ne s'agissant pas d'un rayon, mais d'un faisceau, les Lumières. »

Brefs rappels des traits fondamentaux qui furent les piliers de la première modernité :

Primauté de l'esprit scientifique.

Sur la Providence dont la « révolution newtonienne » est l'illustration la plus marquante.

Réflexion politique.

John Locke, (1632-1704),

Esprit critique, l'Affirmation de l'idée de tolérance.

Pierre Baylé, (1647-1706). Voltaire (1694-1778) écrit dans « Traité de la Tolérance » en 1763, à l'occasion de la mort de Jean Calas victime d'une honteuse erreur judiciaire :

« Puissent tous les hommes se souvenir qu'ils sont frères ! Qu'ils aient en horreur la tyrannie exercée sur les âmes, comme ils ont en exécration le brigandage qui ravit par la force le fruit du travail et de l'industrie paisible ! Si les fléaux de la guerre sont inévitables, ne nous haïssons pas les uns les autres dans le sein de la paix et employons l'instant de notre existence, à bénir également en mille langages divers, depuis Siam jusqu'à la Californie, ta bonté qui nous a donné cet instant. »

Désacralisation de la royauté.

Il faut citer le baron Louis-Armand de La Hontan, écrivain et voyageur (1666- 1715), qui fait des filles des rois des prostituées. Jean-Jacques Rousseau, (1712-1778), écrit « Le Contrat Social » qui implique l'abandon de tous les droits et privilèges, prône la souveraineté du peuple, Voltaire prône naturellement également cette souveraineté !

Le Déisme.

Sans nous égarer, nous étendre outre mesure, abordons un bref instant le Déisme. Il est certain que le Déisme marque la révolte de l'homme contre le dogmatisme de l'Eglise, « Ecrasons l'infâme » mandait sans retenue Voltaire. Son origine se situe en fait, au XVIIe siècle. C'est une croyance en un dieu unique, suprême, immanent, certes, mais qui n'intervient pas dans la destinée des hommes, c'est une vision qui rejette toute Révélation divine, c'est une philosophie qui se fonde sur l'observation attentive de la Nature, de ses phénomènes. Pour le déiste, Dieu n'a pas de représentation, il le ressent dans son cœur, la relation de l'homme à Dieu est directe : par la pensée, sans intermédiaires. Ce sentiment éprouvé sera celui de Madame Guyon, (1648-1717) du Philosophe Inconnu (1745-1803), la « voie cardiaque »... Pour Emmanuel Kant, (1724-1804) « le déisme est une théologie rationnelle transcendantale dans laquelle on pense Dieu d'après des concepts purs et vides d'intuition, comme être premier et cause du monde. »

Le Merveilleux.

Siècles des fermentations qui va voir éclater à sa surface des « bulles d'idées » amenant à cette « Majestueuse Révolution. », comme la nomme Saint-Martin. De l'avis de Nicole Jacques-Lefèvre, écrivain et historienne, le philosophe Inconnu s'efforce, balayant toutes réalités « d'intégrer l'histoire immédiate à ses rêves, ou d'incarner ses rêves dans une historique réalité. » Dans les faits cette Révolution, comme toutes les révolutions aura pour levier la populace. Notre « Philosophe obscure » qui vibre au tocsin, aux clameurs de la rue, écrit encore en désignant cette Révolution : « Elle va laver l'esprit humain. », il affirme en prophète délirant voir dans ces épisodes sanguinaires la main bienfaitrice de la Providence. La Divine Providence a comme homme de main à Paris un certain Stanislas Marie Maillard, surnommé « Tape dur » (1763-1794) qui va être le chef de massacreurs hystériques ! Les cadavres vont s'entasser dans les rues, les prisons, les Couvents, les Abbayes. Saint-Martin, ignore, ou feint d'ignorer, n'en démord pas, il prédit : « Je crois voir dans notre étonnante révolution, un dessein marqué de la Providence de nous faire recouvrer à nous, et successivement à bien d'autres peuples, le véritable usage de nos faculté. » Cette façon d'en appeler à une certaine Providence pour tout justifier, construire l'Avenir ne fut probablement pas de l'avis de la malheureuse Princesse de Lamballe, dont le sexe fut exhibé à la pointe d'une pique ! Plus réaliste, prophétique, sans en appeler à la Providence, Olympe de Gouges (1748-1793) écrit :

« Le sang même des coupables, versé avec cruauté et profusion souille éternellement les Révolutions.»

Le sang coule à Orléans, Versailles, Meaux, Reims, la Providence se toilette dans le sang ! Pour l'anecdote, Olympe de Gouges sera la seconde femme guillotinée de l'Histoire de France.

Voltaire rime :

« Le fanatique aveugle, et le chrétien sincère
Ont porté trop souvent le même caractère ;
Ils ont même courage, ils ont même désir.
Le crime a ses héros ; l'erreur a ses martyrs.
Du vrai zèle et du faux vain juge que nous sommes !
Souvent les scélérats ressemblent aux grands hommes. »

Il apporte cette conclusion à ces drames : « Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. »

Des optimistes comme Leibnitz (1646-1716), le poète Alexander Pope (1688-1744), Christian Wolff (1679-1754) affirment que le Monde créé par Dieu est organisé par la Providence de manière à ce qu'un Mal nécessaire soit toujours compensé par un Bien plus grand ...Saint Martin l'avait-il lu ?... C'est dans ces temps en tumulte que la Littérature se met à cultiver la narration fictionnelle, donc tout ce qui pouvait déranger la montée des mentalités rationalistes : Hercule, Savinien, Cyrano, dit de Bergerac (1619-1655), libre-penseur, alchimiste publie « L'Autre Monde », considéré comme un des premiers romans de Science Fiction ; Dom Augustin Calmet (1672-1757) publie « Dissertation sur les apparitions des esprits » qui obtient un grand succès, et, «Les Vampires ou les revenants » ; Jacques Cazotte : « Le Diable amoureux » livre considéré comme le premier récit fantastique français faisant appel au Diable. C'est aussi le temps où des enfants se mettent à vaticiner, des futures mères prétendent que dans leurs seins leurs rejetons prophétisent, on est témoins de prodiges dans le ciel ! Les peintres mêlent le fantastique à la réalité ! Voici quelques lieux de ralliements privilégiés où s'affutent les idées, les consciences, les utopies, avant de se répandre dans les rues. Il y a les Loges maçonniques, les Salons, comme ceux de Madame de Tencin, Geoffrin, de Lespinasse, de Madame d'Epinay, de Staël, de Madame Necker, de Madame de Genlis, de la duchesse de Bourbon, de Madame Helvétius, familièrement appelée « Minette », de Madame Roland, de Condorcet, de Sainte-Amaranres, et d'autres, et puis il y a en Province de nombreuses Académies en effervescence, on y échafaude, prédit, sans oublier les Cafés. A Paris le Café Procope fut un haut lieu de la nouvelle pensée. Voltaire y joue aux Echecs, Rousseau, Diderot sont des habitués. De nombreuses brochures, feuilles volantes, circulent de mains en mains mettant à mal l'Autorité, elles annoncent des bouleversements. Dans ce contexte qui ne se sent pas devenir prophète ! On pressent le XVIIIe siècle comme « le Temps ultime » !

Les Arts divinatoires, la parapsychologie, le paranormal qui ont envahit les salons, et qui sont considérés par les rationalistes tout crin comme une duperie permettent de prendre une respiration, d'échapper au « tout scientifique » dont les Encyclopédistes ont fait leur cheval de bataille. On tonitrue qu'on ne veut plus croire ... du moins on veut s'en persuader ! De ce monde en évolution ... en révolution, attachons nous à notre personnage entrevu et entièrement conquis par cet irrationnel qui frappe à l'antre d'une Sybille : Louis Claude de Saint-Martin. Il a été préparé au merveilleux, à l'insolite par Martinez de Pasqually dont il fut un temps disciple et secrétaire dévoué. Voici ce qu'il écrit sur sa première rencontre chez la duchesse de Bourbon, avec la prophétesse Catherine Théot, (1716-1794), qu'on surnommait « La mère de Paris », qui déclarait à qui voulait l'entendre être la Vierge, la mère de Dieu. Elle voyait en Robespierre, qu'elle conseillait, le précurseur du Messie, le « consolateur des pauvres » qu'elle devait enfanter à 70 ans. S'était formé autour de la Sybille un groupe de disciples glauques chapeauté par un certain don Gerle, religieux de l'ordre des chartreux, ami de Robespierre qui voyait dans la Révolution, les signes précurseurs du commencement d'un Âge d'or devant durer mille ans ! La Sybille de la Contrescarpe annonçait le prochain avènement d'un règne divin où le peuple français, élu de Dieu, jouerait un rôle de premier plan. Voici la première impression que retire Saint-Martin de cette rencontre avec la prophétesse :

« J'ai eu l'occasion de voir à Petit-Bourg une vieille fille nommée C. qui m'intéressait par ses vertus et par la forte attraction qu'il y avait dans son esprit ... »

Saint-Martin se rendra discrètement, à plusieurs reprises chez la prophétesse, pour la consulter ... par curiosité, seulement ? Peut-être y croisa t'il s'esquivant discrètement, Robespierre ... à qui ses ennemis prêtèrent l'intention, guidé par la Prophétesse, de vouloir, aspirant à la dictature, proposer à la Nation une « Constitution surnaturelle » en prélude à une « Régénération universelle. » Il se peut que l'Incorruptible se soit pris pour une sorte de Messie qui allait régénérer la Terre entière ... Saint-Martin de son côté chahuté par un torrent d'idées qui emportait tout, prophétisait le renversement de l'Eglise, l'avènement d'une Société nouvelle, il fut écrira Louis Blanc (1811-1882) le premier à parler avec flamme de Liberté, d'Egalité et de Fraternité dans les assemblées. Ce langage enthousiaste faillit le conduire droit à la guillotine !

A la chute de l'Incorruptible, Catherine Théot est emprisonnée à la « Petite-Force », où elle décédera. Jugée, elle échappe à la guillotine, on rapporte qu'elle aurait prédit les circonstances de sa fin :

« Je ne périrai pas sur l'échafaud. Un événement qui jettera l'épouvante dans Paris, annoncera ma mort. »

A l'heure où la « Mère de Dieu » expire, 33 jours après l'exécution de Robespierre, la poudrière du château de Grenelle explose, faisant des centaines de victimes.

Toujours chez la duchesse de Bourbon, pour rappel, sœur de Philippe Egalité, élevée Maçonne Parfaite par Bacon de la Chevalerie, Grande Maîtresse de toutes les Loges d'Adoption, passionnée d'ésotérisme, se côtoient mystiques, exaltés, prophètes, astrologues, pythonisses... aristocrates au ventre vide, fripons aussi, on l'entend glisser souvent dans ses conversations le nom de Martinez de Pasqually. Le Philosophe Inconnu, de retour d'un séjour à Lyon, en 1776, rencontre au Palais de l'Elysée devenu la résidence de son amie la duchesse de Bourbon, après rachat à Louis XVI, la marquise de La Croix, voyante, guérisseuse, et de plus ... jolie de sa personne, dont le renom a franchi les frontières. On disait qu'elle entretenait des « relations » avec des esprits incarnés, ses extases se succédaient. Elle offre l'hospitalité à Saint-Martin qui se trouve dans la gêne, elle l'admire, elle s'est plongée dans son ouvrage des « Erreurs et de la Vérité. » Willermoz dans une lettre adressée au comte de Hesse dit que « cet ouvrage opéra dans l'esprit de la marquise une grande révolution dans ses idées. » Les ébats intimes entre la marquise et le philosophe ne tardent pas à alimenter les conversations, on chuchote : fouet, fers aux pieds, aux mains ... on colporte même qu'en dehors de leurs ébats, dans la vie courante elle le bat. Leur liaison dura juste pour Saint-Martin le temps de se refaire une santé pécuniaire, en fait pour parler cru, il se faisait entretenir, tout simplement, nécessité oblige, avec les évènements ses revenus avaient fondu ! Cette version d'une brève vie sexuellement tumultueuse n'est pas sans être réfutée, du moins minimisée par des admirateurs inconditionnels de Saint-Martin qui ont tendance à voir exagérément le « Philosophe méconnu » comme l'appelait Robert Amadou, sans trace d'humour je pense, comme une sorte de ... modèle de vertu, ou presque, ça serait ignorer son grand amour sans retenu pour sa « chèrissime » Madame de Böecklin, son aînée ! Peut-être par faiblesse, par timidité, par jeu il alla jusqu'à promettre le mariage, ou à donner espoir à de jeunes admiratrices éprises de son charme un peu efféminé ..., il réfléchit, argumente le pour et le contre d'une union, s'éclipse ! L'épisode de Toulouse : les deux sœurs éplorées ! Ce qu'il écrit sur les femmes est on ne peut plus savoureux :

« La femme a en elle un foyer d'affection qui la travaille et l'embarrasse ; elle n'est à son aise que lorsque ce foyer-là trouve de l'aliment ; n'importe ensuite ce qui deviendra la mesure et la raison. Les hommes qui ne sont pas plus loin du noviciat sont aisément attirés par ce foyer, qu'ils ne soupçonnent pas être un gouffre. Ils croient traiter des vérités d'intelligence, tandis qu'ils ne traitent que des affections et des sentiments ... Tenons-nous en garde contre les fournaises. »

Logeait au château de Petit-Bourg, « résidence secondaire » de la Duchesse de Bourbon, une prophétesse du nom de Clotilde-Suzette Labrousse (1747-1821) qui aurait annoncé dit-on, la Révolution, la chute du clergé et de la noblesse, elle affirmait que l'Apocalypse de Saint-Jean contenait les preuves que cette Révolution française initierait une « régénération universelle. » ... C'était sur toutes les lèvres !

Peu connue, Mademoiselle Jacqueline-Aimée Brohon (1731-1778) annonce un règne glorieux de Jésus Christ qui doit commencer en 1866 ... Dieu lui parle. Elle donne une explication de l'Apocalypse. Elle annonce qu'il n'y aura plus de couvents, que l'état monastique sera détruit. Elle disait avoir reçu la mission de fonder « l'Ordre des Victimes » Ordre que devaient présider Enoch et Elie.

Les somnambules : madame de Jarente va être la première de toute une série de femmes extatiques qui vont être en rapport avec l'Au-delà. En 1785, Jeanne Rochette, jeune paysanne de 24 ans, au cours de séances de somnambulisme magnétique manifeste des perceptions extrasensorielles, elle voit les morts, ils lui parlent, lui font lire des rouleaux d'écrits, elle communique avec la Sainte Vierge, avec Saint-Jean. Citons encore mademoiselle Bergé, Adèle Lefrey qui elle dialogue avec son ange gardien ... Marie Sonet surnommée la « Salamandre » qui prophétise, et guérit, « Rue de Macon », Elisabeth Giroust pythonisse et guérisseuse, « Rue aux Fers », toutes deux font partie des « Convulsionnaires de Saint-Médard ». Dans le cimetière où ont lieu des guérisons miraculeuses. Des scènes de transes se multiplient autour de la tombe du diacre François de Pâris mort en 1727, qui est considéré comme un Saint. Les Jansénistes dont il a pris le parti viennent se recueillir sur sa tombe ils entrent eux aussi en convulsion.. Certains de ces convulsionnaires s'infligent au vu de la foule des supplices les plus douloureux qui vont jusqu'à la crucifixion, pour prouver qu'ils ont le secours de la Grâce divine. « Cette crucifixion est l'identité totale du corps du chrétien au corps du Christ crucifié. » Les plus ignorants des convulsionnaires se mettent à improviser des discours sur la Grâce, la fin du Monde, lisent dans la pensée des assistants. Certains content des « voyages » qui mettent en scène la Jérusalem céleste :

« [...] Je me suis trouvé dans une ville superbe tant par la beauté et la richesse de ses édifices que par le bonheur et la félicité de ses habitants. Le soleil qui éclairait n'occupait pas un point du firmament comme le notre mais remplissait tout le ciel visible... »

Le Père Lambert témoigne que certains convulsionnaires en crise se mettaient à parler des langues qu'ils n'avaient jamais apprises. Le Pouvoir royal fait fermer le cimetière par une ordonnance du 27 janvier 1732, considérant qu'il y avait atteinte à l'ordre public.

A suivre...

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